Par Rémi Duchemin

Publié le 15 novembre 2010 à 08h56

En déplacement à Décines dans la banlieue de Lyon mercredi 27 octobre, Ségolène Royal s’est adressée à la jeunesse dans un discours tourné résolument vers l’avenir.

Elle a souhaité d’abord répondre aux attaques de la droite sur ses propos dénaturés et sur l’entrée de la jeunesse dans le mouvement social sur les retraites. Précisant modestement qu’elle n’a pas le pouvoir de faire descendre dans la rue par un «pouvoir surnaturel» la jeunesse pour contester le pouvoir en place, elle a par contre compris sa colère. Précarisée, face à un avenir «barré», la jeunesse veut se faire entendre et au nom de quoi voudrait- t-on l’en empêcher ? Elle a défendu ce droit à la parole de la jeunesse "prenez la parole et surtout gardez-là" a-t-elle lancé "parce que la France à besoin de vous pour comprendre et pour construire son avenir avec vous et pour vous".  

 Quant au pouvoir en place, s’inspirant de François Mitterrand c’est un vibrant réquisitoire qu’elle a adressé contre la majorité "La jeunesse n’a pas toujours raison en revanche la société qui ne sait pas l’entendre ou qui ne sait pas la respecter a toujours tort… Les jeunes n’ont pas toujours raison mais une société qui n’investit plus ou si peu dans l’avenir des jeunes générations a toujours tort car elle tourne le dos à son avenir et orchestre son propre déclin".

 Ségolène Royal a ensuite proposé un pacte pour la jeunesse afin de lui rendre son avenir en se basant sur le travail des régions socialistes.

 1) Imposer une obligation aux entreprises, qui reçoivent des aides publiques ou qui participent à des marchés publics, d’ouvrir les portes aux jeunes.

2) Lancer un plan national pour l’apprentissage, «mobilisons l’ensemble du tissu économique … pour que partout les apprentis puissent trouver une place».

3) Développer la formation par alternance, «il faut une volonté nationale».

4) Donner aux jeunes des bourses tremplins pour aider les jeunes à créer leur petite activité, leur petite entreprise, en donnant aussi «un droit à l’échec».

5) Tous les jeunes qui ne seront pas soit à l’école, soit en emploi, soit en apprentissage, soit en alternance, qu’ils puissent trouver une main tendue dans le cadre d’une service civique.

C’est toute une mobilisation que la socialiste veut insuffler pour aider les jeunes à s’intégrer dans la société, "c’est une obligation morale" a-telle dit pour nous tous car elle refuse d’accepter une France qui a le taux de chômage des jeunes le plus élevé d’Europe.

Mais Ségolène Royal s’est aussi adressée directement aux jeunes pour un pacte avec la jeunesse en leur rappelant que s’ils ont des droits, ils ont aussi des devoirs. Certes la société ne donne pas le bon exemple «en se prosternant devant l’argent» mais la jeunesse doit se battre, "vaincre les obstacles".  Faisant référence à Jean Jaurès, Ségolène Royal appelle la jeunesse au "courage"  même si les difficultés aujourd’hui sont plus importantes qu’hier. "Pour réussir, vous devez travailler dur !". Mais si la socialiste refuse la démagogie et se montre exigeante, elle veut croire en cette jeunesse : "Je laisse à d’autres la peur de la fièvre de la jeunesse … car lorsque la jeunesse se refroidit le reste du monde se glace".

Contre cette droite dure, la socialiste a rappelé que la plus grande des violences c’est celle faite aux familles modestes qui ne peuvent financer des études à leurs enfants.

Refusant ainsi de se cantonner dans un simple combat contre les propositions du gouvernement, dans une simple condamnation du laisser faire et de l’absence de volontarisme pour la jeunesse, la socialiste a voulu lancer un message d’espoir pour une autre politique, vaincre la droite dure et faire avancer la France.

Source

Ségolène Royal participait mercredi soir à un débat animé par Najat Vallaud-Belkacem sur le thème "Égalité réelle: quel pacte pour la jeunesse ?" et au cours duquel sont intervenus Laurianne Deniaud, Présidente des Jeunes Socialistes, Erwaan Lecoeur, sociologue et politologue, Dorie Bruyas, journaliste et Directrice de Fréquence École, Marie Sessiecq, déléguée territoriale de l'AFEV.

Lors de ce débat, Ségolène Royal a approfondi sa proposition d'un Pacte National d'Avenir et de Confiance pour la jeunes de France, pour faire enfin la grande cause nationale.

Voici en vidéo quelques extraits de l'intervention de Ségolène Royal :

publié le 28.10.2010 

Le Progrès.fr

La présidente de la Région Poitou-Charentes se trouvait hier soir à Décines, dans la banlieue lyonnaise, pour présenter le projet de « pacte pour la jeunesse » proposé par le Parti socialiste pour lutter contre l'inactivité des jeunes. Dans le sillage de la dame au brushing impeccable, toujours beaucoup de journalistes, mais moins d'élus socialistes. Elle a ensuite discuté avec un groupe d'une vingtaine de manifestants venus de Vaulx-en-Velin, dialogué avec un groupe de jeunes avant de rejoindre la conférence-débat sur la convention pour l'Egalité réelle. Elle a ensuite accepté une interview.

La loi sur la réforme des retraites a été adoptée. Les Français doivent-ils continuer à descendre dans la rue ?

Les Français doivent s'exprimer comme ils en ont envie. Il y a eu un déficit très grave du dialogue social, parlementaire. Il y a eu beaucoup d'arrogance face à tous ceux qui manifestent et font grève. En refusant qu'on mette à bas les acquis sociaux, les Français prennent date pour le futur.

Une fois que la loi est votée, manifester a-t-il encore un sens ?

Ne comptez pas sur moi pour condamner le mouvement social, même s'il fait peur au gouvernement. Cette réforme est injuste et inefficace. Pourquoi les revenus du capital ne sont pas appelés à financer les retraites ? Le gouvernement n'a pas répondu à la question. Nous serons avec les manifestants. Et en 2012, on rendra aux Français la retraite à taux plein à 65 ans et la liberté de partir à 60 ans pour ceux qui ont travaillé dur. Il faut une réforme durable qui fasse consensus. J'ai même proposé un référendum. Si le gouvernement ne l'a pas fait, c'est parce qu'il connaissait le refus des Français.

Vous avez appelé les jeunes à descendre dans la rue...

Je dis que les jeunes ont le droit d'exprimer. On leur lit la lettre de Guy Môquet, mort à 17 ans. Et on pense qu'ils sont trop jeunes pour manifester ? Si on les avait consultés, ils n'auraient pas autant exprimé leur dégoût. J'ai entendu des propos insultants sur les jeunes. Que n'ai-je d'ailleurs entendu moi-même ? C'est tout juste si ce n'est pas moi qui ai cassé des vitrines !

Lyon a été le théâtre de nombreux débordements en marge des manifestations lycéennes...

C'est un signe de bonne santé quand les jeunes ne restent pas inertes face à des réformes brutales imposées par la force. Les jeunes souffrent du chômage et de la précarité. Ils ne manifestent pas seulement pour les retraites, mais aussi parce qu'ils en ont ras-le-bol face à une société qui se ferme devant eux.

Le Parti socialiste n'est lui-même pas toujours cohérent sur la réforme...

C'est de la propagande gouvernementale. Le discours socialiste est clair sur la retraite à 65 ans à taux plein et la liberté de partir à 60 ans, ainsi que sur les efforts sur les revenus financiers pour la financer.

Que pensez-vous de la position de l'équipementier automobile américain Molex qui annonce des bénéfices record après avoir fermé son usine en France ?

C'est choquant, parce que le gouvernement avait promis de réguler le capitalisme financier. Mais les entreprises continuent de faire ce qu'elles veulent. Trouvez-vous normal qu'un revenu par le travail de 1 500 euros et un revenu d'actionnaire de la même somme ne paient pas la même cotisation sur les retraites?

Serez-vous candidate aux primaires socialistes ?

Je vous le dirai le moment venu. Avant de poser ma candidature, j'en discuterai. Il faudra après les primaires un rassemblement, et non pas ce qui s'est passé en 2007. Avec tout ce que j'ai subi, je sais qu'il faut rester uni. Il y a une ardente nécessité de gagner la présidence, pour refermer la parenthèse Sarkozy.

Georges Frêche vient d'être inhumé. Vous sentiez-vous proche de lui ?

Je sais faire la part des choses entre les dérapages verbaux et les valeurs fondamentales d'une personne. Georges Frêche était un personnage truculent et haut en couleurs. Il avait une dimension humaine et une capacité d'action exceptionnelle.

Reccueilli par Laurence Loison